Allocution d'ouverture prononcée par M. Gérard MOULIN
Directeur de la communication des ministères de l'Économie et du Budget


Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,

Le ministère de l'Économie et le ministère du Budget, que j'ai le plaisir de représenter, sont heureux d'accueillir de nouveau cette année l'association pour la promotion du français des affaires et les personnalités de la francophonie, du corps diplomatique, des universités, de la culture, des médias, des entreprises et des administrations.

Votre présence ici démontre le vif intérêt que vous accordez à la langue française, à son rayonnement et à ses implications culturelles et commerciales.

Avant d'être nommé directeur de la communication, j'étais chef de service à la direction des relations économiques extérieures, dont la vocation est de préparer et de soutenir le développement de nos entreprises à l'étranger.

C'est dire que je suis personnellement très sensible au rôle que peut - que doit - jouer le français dans les échanges et à la place envahissante prise par l'anglais.

Le rôle du français dans le monde des affaires est un sujet d'autant plus délicat qu'avec l'accélération du progrès technique, la rapidité des moyens modernes de communication et des transferts technologiques et l'ampleur des échanges mondiaux de tous ordres, l'utilité d'une langue universelle ou au moins reconnue par toutes les parties se pose chaque jour.

Sait-on que la production d'un prototype d'avion, par exemple, ou d'une centrale nucléaire, entraîne l'invention de plusieurs milliers de mots ? Que l'ensemble des lexiques spécialisés d'une langue moderne dépasse le million de termes - chiffre atteint par les grandes banques terminologiques du Japon, d'Allemagne, du Canada et du Québec ?

Ainsi, nous voyons bien que, pour entreprendre, il faut une langue et il faut que cette langue soit vivante c'est-à-dire créatrice. Que pouvons-nous faire aujourd'hui pour faire vivre notre langue, ciment commun de près de 150 millions de personnes à travers le monde ?

En France, s'il s'agit toujours de garder à notre langue ses qualités d'instrument précis d'une société vivante et moderne, il convient aussi d'accorder les moyens à l'ampleur de la tâche et d'y atteler toutes les énergies. Et le meilleur moyen de faire vivre sa langue, c'est de l'enrichir pour éviter que d'autres ne lui prennent sa place.

Sous la coordination de la Délégation générale à la langue française et sous l'impulsion de son délégué général, Bernard CERQUIGLINI, qui nous honore ici de sa présence, les commissions de terminologie de différents ministères, il y en a une vingtaine maintenant, ont à cet égard déjà fourni un travail considérable, notamment dans les domaines scientifiques et économiques. Plusieurs milliers de locutions ou termes nouveaux, en quelques années, ont fait leur apparition, dont près de 300 issus de la seule commission de terminologie économique et financière, grâce à l'ardeur de son président, Jacques CAMPET, également parmi nous.

Ces éminents travaux conduisent ensuite à des décisions reprises par les arrêtés de terminologie. Ceux-ci doivent être pour nous tous la référence qui nous permet, en utilisant les termes, de leur conférer la valeur de l'exemple, celui que nous-même devons donner. J'aurais tendance à penser que l'effet d'entraînement devrait à la longue, dans ce domaine comme en économie, donner les résultats escomptés.

Ainsi, j'ai pu constater à travers les comptes rendus sur le commerce extérieur par la presse que le "FAB" (franco à bord - arrêté du 18 février 1987) a chassé définitivement le "FOB" (free on board), de même que "CAF" (coût, assurance, fret) pour le "CIF" (cost, insurance, freight).

Espérons que "publipostage" et "coentreprise" auront le même succès que "fioul" ou "redevance". "GATT", en revanche, me semble avoir durablement supplanté "AGETAC" (accord général sur les tarifs douaniers et le commerce).

Mais je laisserai à Jacques CAMPET, président de la Commission de terminologie économique et financière, le soin de vous parler tout à l'heure avec plus de précision et de détails des derniers travaux de sa commission.

J'ajouterai qu'en tant que directeur de la communication il m'appartient de veiller au respect des prescriptions édictées par notre propre commission de terminologie. Sur ce point, je sais que nous apportons une attention toute particulière notamment, grâce à la vigilance de notre bureau des publications (dont le responsable est aussi le secrétaire général de la commission de terminologie).

Mais nous participons aussi très directement en région à l'organisation de la coupe francophone des affaires dite du "Mot d'Or" qui nous réunit ici aujourd'hui.

En effet, 12 de nos centres d'information et de communication (CICOM) ont participé en 1993 aux coupes francophone et francophile. Cette opération "Le Mot d'Or" concrétise les relations entre les CICOM et le monde de l'Éducation nationale. Elle permet de présenter les missions et les métiers des ministères de l'Économie et du Budget aux 17000 participants.

Je m'adresse maintenant aux jeunes présents ici, lauréats ou non. Je suis convaincu - car ils sont parmi nous aujourd'hui - qu'ils attachent un grand prix au sens des mots et à la précision de l'expression. Ils ont appris par exemple, souvent avec efforts et difficultés, ce qu'est en mathématiques une condition nécessaire et suffisante dans une démonstration ! Il importe que l'étudiant connaisse avec précision le sens des termes et qu'il soit conscient des éventuelles différences d'acception selon le domaine. La terminologie constitue une aide didactique. Les enseignants sont d'ailleurs souvent plus conscients de l'enjeu terminologique que les spécialistes ou praticiens non enseignants. La terminologie travaille à la croisée de la langue et du réel puisqu'une de ses tâches essentielles est de définir, c'est-à-dire de cerner avec précision les concepts, les processus, les objets et de les désigner par un terme ou une locution.

Jean-Paul SARTRE disait dans "Qu'est-ce que la littérature ?" : "l'homme qui parle est au-delà des mots, près de l'objet ; le poète est en-deçà".

Même si l'on apprécie la poésie, je pense que, dans le monde des affaires, il vaut mieux être "près de l'objet" que poète. C'est pour cela que maîtriser parfaitement le sens des mots me paraît si important dans le développement des échanges : au demeurant, la négociation diplomatique multilatérale, la préparation des contrats d'exportations, les problèmes juridiques entre sociétés sont autant d'exemples où le choix des termes est d'une importance essentielle dans le monde contemporain.

Cet intérêt économique et commercial que revêt la promotion de la langue française est bien perçu par M. LAUGINIE, à qui nous devons l'initiative de cette Journée du français des affaires, devenue traditionnelle, sous le patronage du Haut Conseil de la Francophonie, dé l'Agence de coopération culturelle et technique, de la Délégation générale à la langue française et de nos deux ministères qui ont le plaisir de vous accueillir.

Faire connaître et apprécier les mots d'aujourd'hui, favoriser les échanges grâce à une langue bien faite, puissent ces actions, couronnées par "Le Mot d'Or" et la Coupe du français des affaires, continuer longtemps encore et avoir le succès qu'elles méritent.

J'en suis d'autant plus convaincu que la Communauté francophone vient de réaffirmer avec force son souci de défendre son identité culturelle au sommet qui vient de se tenir à l'Île Maurice les jours derniers.

Autant dire que la manifestation d'aujourd'hui se trouve au cœur de l'actualité et s'inscrit dans le droit fil des préoccupations clairement exprimées par nos représentants sur la scène internationale.

Maintenant, je passe la parole à M. LAUGINIE pour l'ouverture des débats et souhaite bienvenue à tous !

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