Allocution de Madame la Rectrice de l'Académie d'Orléans-Tours (29 mai 1997)


Remise du Mot d'Or 1997
Coupe francophone des affaires et Coupe du français des affaires
jeudi 29 mai 1997


Monsieur le Directeur de l'INSEE,
Madame le Délégué général adjoint à la langue française,
Madame le Chef du Centre d'Information et de Communication du Ministère de l'Économie et des Finances,
Monsieur l'Inspecteur Pédagogique Régional, Président de l'APFA,
Monsieur le Directeur du Centre régional de Documentation pédagogique,
Mesdemoiselles, Mesdames et Messieurs,


"Pour comprendre les choses, apprenons les mots qui en sont, dans noire bouche, l'image soluble" : cette invitation de Paul Claudel met en lumière l'intimité liant notre langage à l'univers qu'il transcrit et explique. La langue doit alors se modifier et se transformer afin de suivre l'évolution constante de la société. C'est cette quête du mot juste, précis et adapté au monde qui nous entoure, que stimule et sert la Coupe francophone des affaires et du français des affaires. Nous sommes donc réunis aujourd'hui pour récompenser les élèves et les étudiants qui allient parfaitement la maîtrise de la langue aux exigences de la gestion et de l'économie.

Plus connu sous le nom de "Mot d'Or", ce concours a l'incontestable mérite d'entretenir toute la force et la richesse de notre langue.

L'académie d'Orléans-Tours que je représente s'honore d'être le berceau de cette entreprise d'envergure, lancée en 1988 et adressée aux pays francophiles. Que soient sincèrement remerciés tous ceux qui s'y consacrent depuis neuf ans avec dynamisme et enthousiasme, afin que
Ce concours, ouvert aux élèves et aux étudiants en économie et gestion, se caractérise par son dynamisme et sa pluralité. La participation, cette année, de 48 académies métropolitaines, pays étrangers, départements et territoires d'Outre-Mer et ruinit d'une longue tradition littéraire et de la conception du langage que nous en avons retirée. "Car, Victor Hugo l'affirme, le mot, qu'on le sache, est un être vivant", doté d'une épaisseur, d'une personnalité, d'une vitalité que le "Mot d'Or" fait clairement surgir, enrichit et complète. Le symbolisme du titre de cette opération fait d'ailleurs écho à notre manière particulière de considérer la langue. L'incorruptibilité de l'or, qui se transforme mais ne disparaît jamais, incarne l'éternité promise à une langue vivante qui sait s'adapter aux mutations économiques et sociales, tandis que la pureté de ce métal précieux évoque l'idéal auquel accède le mot en parfaite adéquation avec l'idée.

Parce qu'il implique à la fois l'assimilation de notre patrimoine culturel et l'intégration au monde économique actuel, ce concours présente de réelles qualités pédagogiques que je veux saluer.

Les compétences variées et complémentaires qu'il exige témoignent de la richesse des formations tertiaires. Car les candidats doivent à la fois faire preuve de rigueur pour maîtriser la langue et de créativité pour concevoir un projet d'entreprise. 11 faut qu'ils aient acquis le vocabulaire précis des concepts modernes des affaires et soient même capables de pallier les manques du langage tout en connaissant parfaitement l'entourage linguistique du français. Mais il faut aussi qu'ils maîtrisent les données et nécessités économiques, tandis que le sens de l'initiative et de l'organisation doit déterminer leurs actions. Ces qualités, requises pour affronter avec succès les exercices du "Mot d'Or", sont autant d'atouts pour mener avec aisance leur future carrière.

Or cette dernière se fondera obligatoirement sur la communication, maître-mot, finalement, de l'opération à l'honneur aujourd'hui. Elle oblige les élèves et les étudiants à adopter deux attitudes contraignantes mais gratifiantes vis-à-vis du langage. Il s'agit, d'une part, de refuser la facilité qui consisterait à adopter passivement le vocabulaire anglais des affaires pour aboutir à ce que l'on nomme parfois "l'anglo-marchand". C'est alors que doit se travailler l'art de la traduction, qui ne se contente pas de remplacer un mot étranger par un synonyme en français, mais qui cherche un terme présentant les mêmes connotations, les mêmes images, les mêmes présupposés. Cette discipline allie la souplesse intellectuelle, l'extrême rigueur et la connaissance parfaite du patrimoine culturel des deux langues. Telles sont les qualités qu'évaluent les première et seconde parties de l'épreuve. Il s'agit, d'autre part, d'entretenir la modernité de la langue française, qu'elle soit maternelle ou non. Aussi les candidats récompensés aujourd'hui ont-ils rivalisé, dans le troisième exercice, d'invention pour créer des mots nouveaux, propres à désigner des réalités nouvelles.

Le "Mot d'Or" fait donc clairement apparaître les deux dimensions fondamentales de la langue française : il en rappelle la charge historique et culturelle et il encourage sa constante évolution. Ce concours témoigne de son perpétuel mouvement et de l'enrichissement qu'elle retire d'une pratique régulière et des nombreuses modifications apportées par les nouvelles nécessités du temps. "Je ne veux pas de formules ; rien que des mois qui suivent pas à pas dans ses moindres détours, retours et rencontres, la marche complexe de la vie", a écrit Alain-Foumier à l'un de ses proche  : en faisant partager cette vision aux jeunes générations, cette opération leur révèle toute l'humanité de la langue française.

Les jeunes gens que nous primons aujourd'hui s'y sont exercés avec talent : leur passion, leur ingéniosité et leurs découvertes ne peuvent que nous inspirer confiance et optimisme pour l'avenir de notre langue et de notre culture. Que soient sincèrement remerciés tous les candidats qui ont ainsi prouvé leur attachement à notre patrimoine linguistique et leur implication dans leur formation et leur future carrière. Que soient chaleureusement félicités les 330 lauréats académiques que nous avons le plaisir de récompenser aujourd'hui. Enfin, il me tient à cœur de saluer tout particulièrement le mérite des cinq jeunes gens qui ont obtenu un prix spécial et sont donc invités à la dixième journée du français des affaires au Ministère de l'Économie et des Finances le 27 novembre prochain. Je veux nommer Ludovic GRIFFI, élève en classe préparatoire économique et commerciale, voie technologique, au lycée Voltaire d'Orléans, à qui revient le prix spécial pour les classes préparatoires tertiaires ; Rébecca GANDON, du même établissement, à qui nous remettons le prix spécial pour les divisions de deuxième année des sections de techniciens supérieurs tertiaires ; Nathalie LATOUR, également du même lycée, qui obtient le prix spécial pour les divisions de première année des sections de techniciens supérieurs tertiaires et qui, en tant que meilleure lauréate du "Mot d'Or", sera à nouveau honorée au Ministère de l'Économie et des Finances en novembre ; Patricia DUR du lycée Jean-Zay d'Orléans à qui nous décernons le prix spécial pour les divisions de Terminales tertiaires ; Christelle MEYNARD du lycée Marguerite-de-Navarre de Bourges, qui reçoit le prix spécial pour les divisions de premières tertiaires.

"Le mot sans l'idée serait un bruit, l'idée sans le mot serait une abstraction, leur jonction est leur vie" : qui, mieux que Victor Hugo qui consacra une partie de sa vie à jongler avec les mots, saurait conclure ? Grâce au souffle nouveau que vous insufflez à notre langue sans jamais la dénaturer, cette "jonction" magique demeure prometteuse et dynamique. C'est une joie pour tous ceux qui, comme nous, sont attachés à la culture et au progrès de voir les jeunes, nos enfants, aussi brillamment associés à ce bel œuvre...


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