Partager la richesse d'une langue


Abdou Diouf, secrétaire général de l'OIF (Organisation internationale de la Francophonie) était en visite officielle pour quelques jours sur le territoire. Dans les locaux de la bibliothèque Bernheim, il en a profité pour remettre le prix du Mot d'Or 2006 aux lauréats calédoniens. Ambassad'or itinérant...

Sur le chemin du Vanuatu, un des derniers pays francophones qu'il s'était promis de visiter, Abdou Diouf s'est arrêté pour trois jours, bien remplis, en Nouvelle-Calédonie, ce dont il rêvait depuis longtemps. Cet espace francophone du Pacifique est, à ses dires, un laboratoire attachant de la diversité culturelle. La vitalité francophone s'y exprime fortement, mais un partenariat avec les langues vemaculaires existe aussi (dans l'enseignement primaire notamment). Le Sénégal, dont Abdou Diouf, successeur de Léopold Sédar Senghor, a été le Président pendant dix-sept ans, avait le français comme langue officielle, mais également six langues nationales constitutionnalisées. La Francophonie regroupe soixante-huit pays solidaires dans le monde qui coopèrent aux plans linguistique, politique, culturel et technique. La Francophonie étend, aussi, son influence dans les domaines universitaire, audiovisuel, parlementaire et de formation de cadres supérieurs. Dans ce monde multipolaire, où un dialogue entre les cultures est nécessaire, le combat de l'OIF est axé sur la promotion de la diversité des expressions culturelles. Comme le dit justement Dominique Wolton, directeur de recherche au CNRS, « La mondialisation est une chance pour la Francophonie » (NDLR : Wolton est l'auteur de « Demain, la Francophonie »). C'est dans cette optique que le secrétaire général de l'OIF a rencontré haut-commissaire, sénateur, élus et membres du gouvernement, hélas pour des visites trop protocolaires. Il s'est entretenu, également, avec le président du comité économique et social, le président du Sénat coutumier et, heureusement, Marie-Claude Tjibaou lui a fait l'honneur d'une visite au Centre culturel, où il s'est attardé dans la case consacrée à Jean-Marie Tjibaou. C'est sur des gospels, interprétés par de charmantes jeunes filles sous la houlette de Josiane Nicar, qu'il a été accueilli dans les jardins de la bibliothèque Bernheim.

AU CŒUR DE L'AIDE EN... LIGNE

Ce qu'on remarque d'emblée chez Abdou Diouf, c'est sa grande taille qu'il promène avec une belle prestance, nimbée par la sagesse de sa chevelure blanche. Pour le centenaire de la naissance de Léopold Sédar Senghor, l'alliance Champlain et son président Daniel Miroux, très ému, ont partagé avec les nombreux présents l'immense honneur de recevoir son disciple. Si l'alliance Champlain a mentionné le rôle du tout jeune Institut pour la Francophonie dans le Pacifique, on peut regretter qu'elle ait omis de citer le CPLF (Comité pour la Francophonie dans le Pacifique sud), association pionnière sur le territoire, dès 1990. L'APFA (Actions pour promouvoir le français des affaires) est, elle, à la base du concours le Mot d'Or, depuis 1989, et se situe au coeur de la mercatique terminologique. En effet. l'APFA a inscrit son programme sur son logo : « Pour l'amour des mots, le bonheur d'entreprendre, l'avenir de chaque culture ». Face à la langue globalisée anglo-saxonne qui étend toujours plus sa toile informatisée, le français peut être aussi une langue de l'économie, même si la Francophonie, en résistance pour fortifier sa place, se refuse à la concurrence entre les langues. Mercatique électronique, aide en ligne et fusionite ne demandent qu'à se substituer à « electronic marketing, hot line et mergermania » dans une vision du monde culturelle et linguistique. En 2006, la neuvième édition de ce concours, fondé par l'APFA, a concerné trente mille concurrents, issus de quarante-cinq pays. Heureux d'être en Nouvelle-Calédonie, véritable porte-avions de la Francophonie dans le Pacifique, Abdou Diouf, son grand témoin, a parlé avec chaleur de la richesse d'une langue vivante, inventant les mots pour décrire la vie. Un des plus beaux exemples étant la langue québécoise, si inventive et imagée.

LOCOMOTIVE D'OR

Une plante sans racines ne produit aucun fruit et perdre sa langue, c'est vivre en exil. Le Président Senghor, ayant fait du terreau des langues sa philosophie, a plané sur le discours de son fils spirituel. C'est avec humour et tendresse qu'il a évoqué les premiers pas d'enseignant de son mentor au lycée Descartes de Tours, dans les années trente. La lecture savoureuse des notations de ses pairs était un hommage supplémentaire à cet homme hors du commun. Le Président Senghor a, d'ailleurs, été un sujet d'oral pour départager les dix meilleurs concurrents calédoniens, eux-mêmes sélectionnés à partir de quatre cents participants. Depuis sa création (cinq cent mille participants et soixante mille lauréats), le Mot d'Or tente de réconcilier le monde de l'entreprise et celui de la poésie, en les reliant par la magie de la langue française. Madame Ghislaine Rivaton, secrétaire générale de l'alliance Champlain. a proclamé le palmarès et les gagnants ont reçu leurs prix des mains d'Abdou Diouf, dont un voyage en Métropole au premier pour rencontrer les autres lauréats. Au final, deux garçons (5e et 1er) pour huit filles ont été récompensés. Les femmes seraient-elles l'avenir de la Francophonie ?

Remise des prix

Abdou Diouf, ambassadeur d'envergure de la Francophonie.

(Les Infos, 1er décembre 2006)

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