LE JOURNAL DE TOULOUSE

French is beautiful, les affaires sont bonnes...

Les anglo-saxons ont-ils donc l'exclusivité de la linguistique des affaires ? Sans tomber dans le protectionnisme langagier, faut-il traiter le domaine de l'économie et des affaires en mélangeant allègrement la langue nationale avec la langue anglo-saxonne ? Certes, le marché mondial exige une universalité du mot facilitant la compréhension et, donnée essentielle dans le monde des affaires, la rapidité et l'efficacité des transactions. Mais l'économie se fait aussi à des échelles plus réduites, nationales, régionales, locales...

Ah, Shakespeare, si on pouvait réciter Roméo et Juliette plutôt que de parader avec le nouveau code langagier, le stress du jeune cadre dynamique plein les artères et les mains tremblantes de dégainer stylo et contrat pour conclure au plus vite... Il n'en demeure pas moins que "l'amour des mots" ça existe, même s'il s'agit de garder son identité culturelle dans les affaires. Le 20 mars 91, avait lieu la journée de la francophonie : et pour célébrer l'événement I'APFA (l'Association Actions pour Promouvoir le Français des Affaires, qu'il ne faut pas confondre avec celle qui œuvre pour ceux que les affaires n'ont pas aidés !) a organisé, pour la 4ème année consécutive, le concours du français dans les affaires, faisant plancher quelque 38 000 candidats (élèves et étudiants en économie et gestion), avec cette particularité que ce concours était plus largement ouvert à la francophonie que les années précédentes. Hier, la remise de la coupe francophone des affaires "le mot d'or" avait lieu à Toulouse pour les lauréats de Midi-Pyrénées. Il s'agissait, pour les 3 000 candidats régionaux, de proposer et justifier un équivalent pour un terme étranger d'usage récent, et de proposer un message publicitaire pour faire connaître et apprécier le terme nouveau retenu. La suprême récompense pour les lauréats serait de voir leur création dans le dictionnaire des néologismes officiels... Pour cette remise de prix, le directeur régional des impôts, le recteur de l'académie de Toulouse et le président de I'APFA étaient présents, et chacun y allait de son petit mot sur les excès du "franglais" et la beauté de la langue française qui est "efficace, rigoureuse et bien faite, répondant donc aux exigences des affaires ". La langue bouge, avance, et il ne faut pas espérer la figer en se raidissant sur des positions de défense et de protection du français. Chaque ministère (agriculture, économique, finances...) a sa commission de terminologie chargée de traiter les termes et le vocabulaire auquel le ministère concerné a recours. Aussi, dans le domaine de l'économie, le terme de "sponsoring", qui est devenu si courant à nos oreilles, a été officiellement remplacé par "parrainage".

Isabelle MARROU

(Le Journal de Toulouse du 30 mai 1991)

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